
Desertfest Jour 1 – La loose et la chance…
4 juillet 2025 0 Par Sofie Von KelenJ’ai bien failli ne jamais vous raconter cette 13ème édition…
Pourtant, entre la découverte d’un Bn’B d’apparence acceptable à 10 minutes de Camden, l’obtention de billets d’avion pas trop onéreux à condition de gruger un peu niveau bagages cabine et l’arrivée de mon accréditation à peu près dans les temps, tout semblait rouler de manière optimale. C’est alors que, tard la veille du départ, alors que j’emballe consciencieusement ma oyster card et mon adaptateur type G, je reçois un message whatsapp d’une amie partie, elle, au Sonic Whip dans un bled néerlandais au nom imprononçable. Ma pote est bien arrivée, mais regrette amèrement l’annulation du groupe Lord Buffalo pour raisons de visa. Une lueur malsaine éclaire soudain une région plutôt reculées de ma cervelle en surmenage… JESUS FUCKING CHRIST… J’AI COMPLÈTEMENT ZAPPÉ CETTE HISTOIRE DE VISA !!!
En effet, depuis le 2 Avril, un sésame répondant au doux nom de ETA est devenu nécessaire afin de se rendre en territoire british. Et bien que son obtention semble facile, celle-ci prend a priori 3 jours ouvrés… Ni une ni deux, je me rue sur le site officiel en adressant des prières angoissées aux divinités du city trip anglais qui m’avaient déjà bien dépannée il y a une dizaine d’années, lorsque j’avais oublié mon passeport dans un point Mondial Relay la veille d’un départ à Sheffield, ainsi qu’il y a 4 ans, alors que ledit document s’était avéré périmé à moins de deux semaines du festival… Et comme il y a une providence pour les crapules, une réponse positive me parvient aux petites heures du jour et me permet de jaillir à temps dans la salle d’embarquement du terminal low cost.
Ain’t nothing but the The Devil and The Almighty Blues
Un vol quelque peu acrobatique, une power nap et une expo à la Tate Britain plus tard, me voici à Camden en train d’examiner les propositions de pre-shows du jeudi. Et à vrai dire, entre un énième groupe de stoner au Black Heart pour lequel il me faudrait débourser 15£ et du death plus brutal qu’un 49.3 au Dev, rien ne me motive outre mesure… Direction donc Soho et le Nothing But The Blues, club mythique où je profite d’un bon concert de blues rock en me faisant rincer par un organiste professionnel en Harley arborant une chevalière maçonnique. Londres, je t’aime!!
Les choses sérieuses débutent vendredi, plus exactement à l’Electric Ballroom, le poignet dûment corseté d’un bracelet rouge bordel, un grand verre de prosecco à la main. J’ai l’air prête, mais je ne le suis pas. Personne ne l’est d’ailleurs, je crois…
J’ai l’air prête mais je ne le suis pas
Commencer un festival avec The Devil and Almighty Blues, c’est comme boire ta mirabelle artisanale avant le dîner. Ça te prend par surprise, ça te réchauffe, ça te tord l’estomac, ça met sens dessus dessous l’ordre des choses et ça te donne brièvement l’impression que tu ne pourras plus jamais rien avaler d’autre sans avoir l’impression de souiller ton corps et ton âme…
Après avoir clos les hostilités à l’Underworld sur l’édition de 2016 et fait chialer la moitié de la salle, les norvégiens investissent ce grand espace carrelé pourtant réputé difficile pour y déverser majestueusement leur heavy blues ultra-émotionnel et laissant parfaitement respirer les morceaux grâce à des parties de chant souvent courtes. Histoire d’enfoncer le clou, ils entament le set avec Salt The Earth, l’un de leurs meilleurs titres sur lequel je remarque un léger changement dans les harmonies et… ah tiens, un nouveau guitariste!
Nous avons donc à gauche Torgeir Valdemar, le visage mangé comme d’habitude par un immense chapeau, au toucher plus knopflerien que jamais, et à droite un petit nouveau format chaton, mais shreddant comme Page et Collins réunis. Difficile de vous dire de qui il s’agit, car bien que j’aie eu l’occasion de bavarder avec lui un peu plus tard dans la journée, j’ai complètement oublié de lui demander son nom et il est en outre mission à peu près impossible de trouver online des infos récentes sur le line-up du groupe. (Si quelqu’un sait quelque chose, merci de me DM sur Insta)
…le nouvel arrivant touche sa bille…
Toujours est-il que le nouvel arrivant touche sa bille et apporte une vibe un peu prog 70’ grâce à une extension des temps de solos loin de me déplaire. Nous avons donc à présent un binôme full Gibson encadrant un Arnt Andersen en djellaba plus hiératique que jamais. La vibe est incroyable et je lutte contre l’intuition contre-productive, mais tenace que je suis en train de vivre le moment le plus intense de la journée.
OvO & Arabrot: Ovnis de l’Underworld
S’ensuit un coq à l’âne comme on en fait peu avec OvO, duo italien black noise aux antipodes de l’esthétique humaine et musicale en vigueur au Desertfest. On parle ici de deux créatures sabotant la binarité de genre à coup de haillons crypto gothiques, de dreadlocks traînant littéralement par terre et de je m’en foutisme plus crust que l’intégralité des groupes ayant foulé les scènes de feu le festival Heavy Days in Doomtown. Tant mieux, après la raclée norvégienne, il fallait bien cette rupture radicale afin de reprendre ses esprits.
Underworld et noise toujours, Norvège encore avec Arabrot, projet difficile à définir de Kjetil Nernes autour duquel évolue un line-up assez protéiforme. Aujourd’hui le co-front est entre les mains de Karin Park, artiste electro pop aussi charismatique qu’une héroïne de giallo. La vibe est assez new wave, très groovy et fonctionne bien sur un public encore frais et accueillant chaleureusement les rythmes binaires et le storytelling assuré par Karin qui nous raconte sur une nappe de clavier chamanique l’histoire de son mariage avec un Kjetil quasiment revenu d’entre les morts.



Hexis dans ta gueule
Je ne vous l’ai pas encore dit mais ce week-end, à l’exception de deux ou trois favoris de longue date que je ne louperai pour rien au monde, j’ai décidé d’oublier un peu les têtes d’affiche.
Le concept Desertfest en général et plus particulièrement celui de Londres est en effet l’occasion rêvée de sortir de sa zone de confort et de parfois délaisser les headliners au profit d’obscures pépites. J’ai entendu ici et là en amont de cette édition que certains trouvaient dommage cette année le manque de grosses machines du genre et l’affiche un peu plus confidentielle mais pour ma part, c’est justement ce qui fait tout son charme.
J’écourte donc ma présence devant Elder, aussi constants dans l’excellence que dans leur capacité à faire pogoter le public sur du psyché instrumental afin de retourner sous terre en compagnie d’une poignée d‘acharnés devant le punk hardcore blackisant de Hexis. C’est danois, ca joue très fort, ça emprunte au hardcore le côté éruptif de la démarche et au black old-school la surexploitation de la moindre nanoseconde à coup de riffs mineurs.
Deville au Dev
Trente minutes plus tard, la claustrophobie me gagne et j’aspire à respirer l’air de la surface. Ça tombe bien, il y a du stoner metal suédois dans l’air au Dev, la plus petite scène du festival sise au fond d’un bar metal old-school le long du canal. Considéré par beaucoup comme le troquet le plus true de Camden, le Devonshire Arms a ce côté old-school manquant cruellement aux bouclards hexagonaux de même obédience. La team est à peu près la même depuis des lustres, tu peux y écouter du Bolt Thrower le lundi soir et les prix restent gérables alors que la moindre tireuse à bière du quartier semble nécessiter la cession de l’un de tes organes.
Je mentirai si vous disais que j’ai suivi le concert de A à Z, les retrouvailles avec un copain d’Arizona rencontré à l’Arctangent ayant quelque peu trollé le show, mais tout ce que je peux dire c’est que j’adore clore les hostilités avec quelque chose de simple et très énergique comme ce stoner’n’roll bien foutu et fait pour les fins de soirées. C’est suédois, ça va tout droit et malgré un line-up plutôt fluctuant, Deville mérite le détour et la mention.
C’est tout pour aujourd’hui, les excès de la veille se faisant sentir, je regagne mes pénates à une heure décente, cherchant du regard les habituels renards errants du quartier qui ce soir brilleront par leur absence.
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