Nytt Land : Cvlt

Nytt Land : Cvlt

5 juin 2020 0 Par Jack

Originaire des contrées sibérienne, Nytt Land n’aura pas mis longtemps avant de se faire connaître par chez nous . Il faut dire que le neofolk et le neopaganisme ont le vent en poupe depuis quelques années, alors forcément sur le papier, la recette est alléchante. À raison de pratiquement un album par an depuis leur création en 2013, le groupe compte déjà une joli discographie de 5 albums. Odal parut en 2018, Fimbulvinter en 2017, Sköpun : Songs from Elder Edda en 2016, Hàvàmàl en 2015 et enfin Nytt Land, album éponynme parut en 2013. Leurs textes sont principalement inspirés par la mythologie nordique, ainsi que les textes de l’Edda poétique ( ensemble de vieux poèmes islandais datant XIIIème siècle ).

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Qu’il s’agisse du vinyle, ou de la version CD, la typographie attire tout de suite l’oeil. L’inspiration nordique s’en ressent immédiatement, et se retrouve directement inspirée des runes. Le design général quant à lui, diffère entre les deux ou un visage et une tarentule apparaissent sur la version CD. A noter également que certains morceaux ne sont pas présents sur la version vinyle. ( 8 pour le vinyle contre 11 sur le CD ).

Valhalla Rising

Premier morceau de l’album, Valhalla Rising possède une ambiance authentique donnant l’impression de se retrouver dans une reconstitution de ce qu’aurait pu être un chant traditionnel scandinave. Très répétitif, celui-ci joue une place discrète et le tout s’assemble dans une rythmique chamanique apaisante. Ici pas d’instruments modernes, le charme se fait essentiellement sur la répétition des temps, et par l’utilisation de la tagelharpa, instrument traditionnel qui est une lyre à quatre cordes frottées ( famille d’instruments qui regroupent entre autres les violons, violoncelles, contrabasses actuellement. ), ainsi que du kantele finnois, instrument à cordes pincées ( famille de la cithare, du luth … ) On ressent aisément l’esprit expérimental qu’à voulut apporter le groupe, et bien que le morceau en lui-même n’est pas transcendant, il reste très agréable à l’écoute.

Sigrdriva Spell

Dans la mythologie nordique, Sigrdriva est une valkyrie ( divinité guerrière ), on imagine aisément que ce titre est inspiré par l’Edda poétique dont elle y est mentionnée. Ici le chant occupe une place bien plus importante bercée par la voix de Natalya Pahlenko accompagnée par des cœurs gutturaux. Ceux-ci rappellent fortement les chants diphoniques mongols ce qui n’est pas surprenant quand on sait que le groupe vient de Sibérie. On ressent plus fortement la part d’inspiration provenant de leur terre natale, ce qui apporte une touche de fraîcheur et d’innovation. Le morceau est un peu plus dansant que le précédant lors de ses parties instrumentale, mais cela reste néanmoins timide.

Song of the Kazym Goddess

Contrairement aux deux premiers morceaux, Song of the Kazym Goddess est davantage orienté metal que traditionnel… du moins au début. Celui-ci fait référence à un ancien rituel provenant des peuples autochtones Khantys en Sibérie. La présence d’une batterie et d’une guitare électrique accompagnent les chants diphoniques déjà présents sur le deuxième morceau. Pourtant, cela sera vite balayé par la voix de Natalya Pahlenko qui fera plonger l’ensemble dans quelque chose de très similaire à Sigrdriva Spell. On ressent une légère déception face à cela, car le groupe semble toujours rester sur la réserve. Si l’aspect chamanique reste présent, l’aspect expérimental du metal a été laissé pour compte, ce qui nous laisse un peu sur notre faim. Peut-être que le désir était davantage d’accentuer l’écoute sur cet hommage ancestrale, mais il aurait dans ce cas mieux valu rester sur un aspect totalement traditionnel. Dommage, car lorsque l’on creuse un peu l’histoire derrière cette chanson, il y’a un vrai travail historique et culturel fourni.

Rígsþula

C’est toujours bercé par des chants que ce titre s’enchaîne. On se sent ici plongé comme dans une cérémonie religieuse. Pas d’exception cependant, on reste sur une certaine zone de confort. Les chants diphoniques restent toujours merveilleusement bien maitrisés et entraînants. Le bourdon grave produit par la gorge, donne toute sa dimension chamanique au titre en rendant l’ambiance crédible. Par crédible, entendons qu’on se sent transporté dans une autre culture, et qu’on ne tombe pas dans la fausse bonne interprétation moderne qui pourrait être risible. On ressent que quelque chose de puissant se dégage du titre. Cette fois, le pari est réussit.

Seven Spirits in White Coats

L’esprit metal fait son retour dans ce 5ème titre ce l’album. Plus dynamique et plus rythmée, on à affaire à quelque chose de plus entraînant. Il se mêle parfaitement aux instruments traditionnels dans un cocktail intéressant mêlant passé et présent. On pourrait cependant reprocher à la batterie de manquer de puissance, et d’être encore trop sur la réserve. Ici plus qu’elle, c’est la tagelharpa couplée au chant qui apporte toute sa dimension mystique au titre. Le groupe semble plus novateur ici, et on sort davantage des sentiers battus. Pour autant, il manque un petit quelque chose pour qu’on se sente réellement transporté dans leur univers.

Pusel ov Aki’s song

Dès les premières notes on se rend compte que le titre dégage quelque chose de très solennel. Le chant est mélancolique, et semble vouloir nous transmettre une émotion d’une autre époque. On se sent facilement embarqué par la voix de Natalya Pahlenko. On part sur quelque chose de plus construit et convaincant.

Ar Hotan Imi

Tuomas Rounakari violiniste de Korpiklaani est présent sur ce titre. Ici, l’instrument se révèle extrêmement discret face au chant qui occupe une place majeure. Les chants diphoniques occupent également une place importante. Si la voix de Natalya Pahlenko reste toujours un régal pour les oreilles, le violon est bien trop discret pour qu’on y accorde une réelle importance. Pourquoi ne pas l’avoir davantage mit en avant ? Cela aurait indéniablement rajouté un charme à l’ensemble. Déjà souvent mis en retrait dans le milieu metal, Nytt Land aurait pu se lâcher véritablement et faire quelque chose de très innovant. Malheureusement, le groupe reste encore dans sa zone de confort une fois de plus. Petit point positif néanmoins, qui n’en sera pas forcément un selon vos attentes, le morceau dégage quelque chose de très serein et posé. Parfait pour une ambiance reposante.

Niðavellir

Dans la mythologie nordique Niðavellir correspond au monde des nains. C’est donc une autre chanson encore bien empreint de sens et de référence que nous offre le groupe. Celle-ci semble vouloir nous transporter, donnant la sensation de raconter une histoire. On s’y laisse prendre, bercé par cette impression de voyager hors du temps. Encore une fois, le chant reste l’un des points fort de Nytt Land malgré les défauts qui ont été reprochés jusque la. Elle est crédible, agréable, impliquée, tente de réellement percer l’âme de celui qui écoute. Le chant final en donnerait presque des frissons et la chair de poule vu l’émotion qui s’en dégage. Ici, c’est une très belle surprise et un quasi sans faute qui laisse sur un sentiment positif. L’un des morceaux ou on regrette vraiment de ne pas comprendre le vieux norrois ( langue scandinave médiéval ).

Sólarljóð

Les chants diphoniques sont de retour dans une rythmique répétitive, donnant l’impression qu’un vieux guerrier nous conte une histoire dans une ambiance transcendante. Ici la voix féminine passe davantage au second plan. C’est autre chose qui cherche à être transmit. Une autre sagesse, une autre parole … Plus que la mythologie scandinave, on se sent à nouveau projeté dans les steppes sibérienne et on sent une nouvelle fois qu’il s’agit d’un hommage non dissimulé à leur terre natale. C’est là que repose la vraie force de Nytt Land, au plus prêt de ses racines, cette part encore méconnu mondialement dans la musique et peu exploité, en ne cherchant pas à imiter bêtement les autres groupes de neopagan et neofolk. C’est sur ce terrain qu’on les sent les plus à l’aise et dont on ressent le plus le travail en amont. Cette fois-ci il n’y a rien à redire. C’est authentique, et très beau.

Song of the Goddess Keeper

Ce 9ème titre retourne sur une rythmique répétitive, et entraînante. On baigne clairement dans le spirituel ici. Les percussions font en un amont un travail fabuleux qui contribue largement à l’ambiance. De plus, Masha Scream chanteuse d’Arkona est également invitée sur ce titre. Voilà un titre qui apporte un peu de punch à l’ensemble.

Sortunut ääni

Notons la présence de Jonne Järvela chanteur de Korpiklaani sur ce morceau. De plus celui-ci chante dans sa langue natale, puisqu’il s’agit d’un titre en finlandais. Celui-ci clôture magnifiquement l’ensemble en se démarquant du reste de l’album. Tout le long, nous restons sur un rythme lent qui apporte une dimension mélancolique et presque plaintive.

Nytt Land a su s’entourer d’artiste de qualité pour cet album.

Bilan :Nytt Land nous laisse plusieurs sentiments différents. Il y’a tout d’abord cette impression très décontractée qu’on ressent par l’ambiance de l’album tout du long. On ne l’écoute pour se défouler les nerfs, mais on prend le temps de savourer, apprécier, on se plonge dans quelque chose de spirituel, toutefois ça n’est pas forcément aussi transique, ou incantatoire comme le pourrait être un groupe tel que Heilung qui fonctionne beaucoup avec ce principe-là. Cela amène donc à se poser la question suivante : Est-ce un album qui pourrait être écouté et apprécié pleinement en live ? La réponse est complexe. Elle dépendra des attentes de chacun. Et bien que les comparaisons soient rarement appréciées ou pertinentes, on pourrait davantage les rapprocher sur le style de Danheim, que d’autres groupes de neofolk. Nytt Land a les capacités de se surpasser, et pour cela peut-être vaudrait-il mieux espacer les sorties d’albums afin de travailler davantage cet univers. Si Cvlt reste un bon produit fini, il n’est pas pour autant une grosse claque.