Leprous, The Ocean

Leprous, The Ocean

9 décembre 2019 0 Par Erwan Meunier

Voyage hors du temps et pris au piège au Cabaret Sauvage

Par cette fraîche nuit de novembre, j’accède, non sans difficulté, au Cabaret Sauvage aux côtés de quelques retardataires, aussi égarés que moi dans les méandres du Parc de la Villette.

Que de nouveautés pour mes yeux et mes oreilles… Enfin, surtout les oreilles, la salle étouffe d’un mélange de condensation et de fumée, autant dire qu’il n’y avait pas grand-chose à voir. J’arrive malheureusement trop tard pour apprécier Port Noir. Cependant, pendant que j’avance à tâtons entre la fumée et le stroboscope, The Ocean ouvre son set sur Permian : The Great Dying, de son dernier album en date, Phanerozoic I: Palaeozoic (2018) devant une salle statique, mais quasiment pleine.

Je n’exagère pas quand je vous dis que ce groupe est une de mes plus belles découvertes de l’année. Les allemands signés sans surprise chez Metal Blade ont un son tantôt puissant avec un chant rappelant presque Joe Duplantier, tantôt aérien avec des riffs aériens. Chaque morceau est un voyage, de la plus haute couche de l’atmosphère jusqu’au plus profond des abysses, je comprends la cohérence avec la tête d’affiche ainsi que Katatonia, normalement présents en featuring sur Devonian : Nascent.

Un court interlude sera appuyé par un larsen suivi de chants de baleines, renforçant l’ambiance sous-marine des spots bleus. C’est sur Firmament, tiré de leur quatrième album Heliocentric (2010), que Loïc Rossetti (chant) s’aventurera hors de la scène, au dessus de la foule, tel Jésus marchant sur l’eau – oui, oui, en marchant, pas en slammant. C’est ici que s’achève ici notre voyage en compagnie de The Ocean, mais nous attendons avec impatience le deuxième volet du dyptique de Phanerozoic, déjà en cours d’enregistrement à l’heure où vous lisez ces quelques lignes.

Entracte. On se bat, on se bouscule, tu n’te réveilles pas… Ah non, c’est pas ça. On se bouscule pour trouver une place un peu plus potable, ce qui n’est pas gagné, vu l’agencement de la salle. Des spots blancs et un fond musical ambiant à la Max Richter assurent la transition. La programmation a déjà un peu de retard… 21:40, le groupe principal se fait désirer.

C’est le moment de découvrir Pitfalls en live avec Below en ouverture, où comment démarrer on a high note (no pun intended). Frais de quelques semaines à peine, l’album sera mis à l’honneur, dans un registre moins Metal Progressif, plus Pop-Rock, sans pour autant tomber dans les poncifs revus et réentendus du genre. Leprous enchaine avec quelques titres plus datés, piochant dans Malina, avec les incontournables From The Flame et Illuminate (à titre personnel, j’aurais rajouté Stuck), et Coal, réjouissant les plus connaisseurs.

Einar Solberg se libèrera un peu plus de son clavier, occupant davantage la scène et fera un effort pour communiquer avec la salle bondée ! L’effort sera de courte durée, mais ça ne fait rien, moins d’interruptions facilitent l’immersion dans l’univers du groupe, très adéquate pour Observe The Train, comme un Logical Song down-tempo et plus aérien.

Ce n’est pas tant un reproche qu’un point négatif que je soulèverai, et sûrement le seul, c’est qu’Einar ne tiendra pas aussi bien les aigus sur la deuxième moitié du set, notamment Alleviate. Qu’à cela ne tienne, on continue avec At The Bottom, laissant By My Throne passer à la trappe, peut-être trop Pop-Rock façon Muse à leur goût ?

Voilà venu le rappel apothéotique du show, le rythme saccadé de The Sky Is Red fait bouger les têtes, le tout baignant dans une lumière rouge presque aveuglante. En plus d’un magnifique solo de Tor Oddmund Suhrke et d’un lightshow réglé à la perfection, la voix d’Einar impose le respect jusqu’au bout, et le groupe repousse à chaque occasion les limites d’une prestation nette, sans bavure, et forte en émotions.