Venoge Festival – Live report de la Rock Night
24 septembre 2019Intro :
21 août 2019. Penthalaz, petit village Suisse situé dans le canton de Vaud, accueille pour la dernière année sur son site le Venoge Festival. Peu connu en dehors du pays Helvète, c’est pas moins de 5 jours de concert, avec 28 500 festivaliers et dirigé par 800 bénévoles. Hétéroclite, chaque jour correspond à un thème, permettant ainsi au festival d’avoir une diversité cohérente afin d’attirer un maximum de monde . Retour sur la journée du mercredi ( Rock Night ) ou nous avons eu la chance d’être présent pour vous fournir ce reportage.
Silver Dust : est un groupe originaire de Porrentruy dans le Jura Suisse, fondé en 2013. À mi-chemin entre le steampunk, l’ère victorienne et un univers burtonien, ils connaissent un succès rapide dans leur pays en se classant 1er avec le clip de So let me now, issu de leur premier album Lost in time. Ils jouent par la même occasion au Montreux Jazz Festival, ouvrant les festivités pour des groupes tels que Deftones, Eluveitie ou Mass Hysteria. Mais ce n’est en 2016 que tout décolle véritablement, lorsqu’en gagnant le concours du Greenfiel Festival, ils se voient offrir la possibilité de jouer en ouverture d’Amon Amarth et de Nightwish. Le line-up est composé de Lord Campbell et Tiny Pistol au chant et aux guitares, de Kurghan à la basse et de Magma à la batterie. Ils ont sorti 3 albums et chantent en anglais.
Premier groupe à jouer sur la scène de La Licorne, Silver Dust se voit ainsi attribuer la meilleure place pour commencer son show. L’arrivée d’un mystérieux personnage masqué et encapuchonné marque le début des festivités. Le quatuor prend rapidement place sur scène. Il est impossible de passer à côté de la dégaine « dandy steampunk » surtout que lorsque son chanteur fait son entrée accompagnée d’un mousquet ( ancienne arme à feu de la Renaissance. ), ni du grand miroir derrière qui présage une utilisation pour la mise en scène. Il y a une foultitude de petits détails comme la rose noire du micro qui accroche notre regard. Un vrai travail de préparation à dû être effectué en amont pour rendre cette originalité aussi professionnelle.
Le groupe commence sa prestation devant une foule calme absolument pas pressée. Guitares et basses guerrières sonnent comme un coup de tonnerre dans le ciel d’été. Un batteur un peu plus en retrait derrière, mais dont la puissance s’équilibre parfaitement avec le reste. La voix se dévoile, en parfait accord avec ce qu’elle veut transmettre, ponctuée d’effets et accompagnée par des cœurs, rendant le chant presque religieux. La pêche qui émane d’eux est palpable. Il y’ a un vrai contact visuel et énergétique avec le public.
Le miroir cache en réalité un écran comportant des personnages avec lequel va s’effectuer un jeu d’interaction assez inédit. Comme une scène de théâtre musicale. Il y’ a également l’apparition de deux personnages, l’une vêtue de noire, et l’autre de blanc sur le morceau Forever qui semble apporter un message aux spectateurs.
Le public est captivé. Ce jeu de scène parfaitement intégré nous ferait presque oublier pourquoi nous sommes là. D’une certaine manière, quelque chose en eux nous rappelle l’univers de fiction des vampires. À la fois sensuel, violent et qui fait ressortir une énergie ancienne. Car musicalement, nous alternons entre quelque chose d’assez lourd, sombre, ce qui pourrait faire basculer le groupe dans l’univers gothique, et à la fois des sonorités chaudes qui nous rappelle cette ère baroque, surtout lorsqu’ils intègrent le clavecin ( instrument phare cette période ) dans leurs morceaux. Comme un contraste entre la lumière et les ténèbres, le péché et la vertu.
Puis subitement tout le monde quitte la scène, à l’exception du chanteur qui brandit une guitare avant d’entamer un jeu de questions-réponses musicales en solo avec le personnage masqué du miroir, sur la musique Toccata et fugue en ré mineur de J.S. Bach associé dans la culture populaire au Fantôme de l’Opéra. L’un des meilleurs moments du concert.
Du début à la fin, le concert aura été un sans-faute pour cette étoile montante du metal Suisse. Et bien qu’ils ne soient plus des inconnus, Silver Dust est un groupe à suivre avec intérêt d’autant plus qu’ils se préparent à effectuer un véritable marathon scénique en enchaînant 50 dates en 53 jours dans 26 pays. Nous leur souhaitons bonne chance !
Hey Satan :
Hey Satan est un groupe de stoner rock originaire de Lausanne en Suisse. Après un premier album en 2017 qui a su convaincre les férus du genre, Orange Moon nous parvient en février 2019. Le trio à la particularité de jouer à deux guitares et d’avoir fait l’impasse sur le bassiste. Amis de longue date et jouant depuis les années 90, le groupe helvète est loin de l’amateurisme de par son parcours musical. On peut entres autre citer le groupe de néo-metal Suisse Shovel, dissous en 1999 et Houston Swing Engine groupe de rock hardcore Suisse parmi leurs anciens projets. Le line-up est composé François et Laurent aux guitares et au chant, ainsi que Frank à la batterie. Ils ont sorti 2 albums pour le moment et chantent en anglais.
Trio masculin vitaminé, il est le deuxième groupe de la journée à jouer sur la River Stage, scène située sous un chapiteau un peu plus en retrait de la scène principale. La Suisse met à l’honneur son pays encore une fois. Quoi de plus normal dans ce village vaudois ? Mais elle va surtout nous montrer qu’elle ne fait pas vraiment les choses au hasard.
Si la voix rauque résonne un tantinet plus faible par rapport à la puissance des instruments, il est évident après deux ou trois morceaux qu’on est loin de l’amateurisme en ce qui concerne le jeu. Déchaîné, le chanteur saute avec sa guitare, se met à genoux devant les baffles et nous gratifie de ses riffs endiablés. A vrai dire on en oublie même que le groupe est dépourvu de bassiste. L’appréciation ou non de ce choix sera strictement subjective, car il est vrai que depuis quelques années, ce type de formation devient de plus en plus courant. Il y’ a les pour et les contres pour diverses raisons. En l’occurrence, cela ne semble pas perturber le batteur outre mesure, la section rythmique semble avoir été adapté spécialement pour ça. La batterie disciplinée assure son taff de A à Z, et s’il arrive dans certains groupes live qu’elle soit trop en retrait, ici il est impossible de faire l’impasse dessus avec la puissance qu’elle dégage. Le deuxième guitariste semble donc être un soutien de la batterie ou un remplacement de la basse, ce qui confirmerait donc l’idée qu’il ne s’agit pas du fruit du hasard, mais d’un choix technique parfaitement calculé. Ou le hasard est drôlement bien fichu.
Côté public l’ambiance est au rendez-vous. Chaleureuse et attentive et bien que le chapiteau ne soit pas bondé de monde, Hey Satan se révèle être un choix judicieux à cette heure de la soirée, préparant émotionnellement aux futurs mastodontes internationaux qui vont suivre, tout en apportant cette touche de fraîcheur helvète dont eux seuls ont le secret.
Le choix du combo lumière bleue + brouillard assombrit considérablement la scène sous le chapiteau. Question de goût ou de choix dira-t-on. Il est vrai que cela participe aussi à l’ambiance. Après ça ne dure pas suffisamment pour que l’on fasse une critique plus sévère là-dessus. À côté de ça, les effets restent dynamiques, et la nuit n’est pas encore tombée.
La fin du concert sera un vibrant hommage à leur jeunesse musicale. On lorgne clairement sur du hardcore, par la violence du chant et la brutalité de l’instrumental. Comme une manière pour eux de ne pas oublier d’où ils viennent et de le nous le faire partager.
Hey Satan est une excellente découverte live, qui pour un peu, aurait presque aisément pu jouer sur la grande scène du festival. Le groupe est prometteur et nous vous encourageons vivement à les suivre de près. Petit groupe qui a tout d’un grand, pour peu qu’ils fassent les bons choix et continuent sur leur lancée.
Skunk Anansie :
Skunk Anansie est un groupe de rock alternatif anglais qui se forme en 1994. En 1995, leur album Paranoid & Sunburnt se classe n°8 en Angleterre et les fait connaître un peu partout en Europe. Après la sortie de Stoosh en 1996 qui sera classé disque d’or dans plusieurs pays européens, ils voient leur carrière décoller en Europe. Tout au long de leur existence, ils ont expérimenté divers styles : passant du rock, à la dub, au funk ou encore au punk. D’ailleurs ce dernier est peut-être celui qui caractérise le mieux groupe. Très engagés, ils ont toujours eu des positions militantes notamment de par sa chanteuse féministe et antiraciste. Ce cocktail détonant d’idées et de mixité culturelle a démarqué le groupe de tout ce qui pouvait se faire chez les british dans les années 90. Après une séparation à l’amiable en 2001 où chacun poursuit des projets solo, ils officialisent leur reformation en 2008 et retournent sur scène l’année suivante. Le groupe est actuellement composé de Deborah Dyer alias Skin au chant, Ace à la guitare, Cass à la basse et Mark à la batterie. Notons aussi la présence d’Erika Footman au clavier et micro. Ils ont sorti six albums depuis leurs débuts et chantent en anglais.
Deuxième groupe à jouer sur La Licorne, le jour s’évanouit lentement lorsque le changement de plateau s’effectue. L’arrivée du quintet se fait sur un fond musical jungle nappé de synthé. Auditoire en fureur, et Skin emmitouflée dans une grande cape argentée.
Le guitariste semble toujours très serein lorsqu’il joue, même dans les morceaux les plus heavy. La basse très lourde, accompagne parfaitement le batteur à la section rythmique. Les années d’expérience s’en ressentent, de même que leur capacité à alterner entre différents styles avec brio. Le son est puissant, très pétaradant, mais équilibré ce qui apporte tout le punch qu’il faut pour mettre l’ambiance. Le groupe n’est pratiquement jamais resté sur ses acquis à quelques exceptions près, et bien que leur carrière n’a pas été faite que d’unanimité loin s’en faut, il faut reconnaître qu’ils ont toujours cherché à se réinventer. La symbiose entre les musiciens est forte et s’en ressent dans le jeu. Il faut dire que la formation n’a pas changé depuis 1995, ce qui est plutôt rare dans un groupe de cette longévité.
Skin, présence féminine de la soirée sur une affiche exclusivement composée d’hommes, épate tant par la puissance de sa voix que par son charisme. Elle n’hésite d’ailleurs pas à slammer dans la foule en toute confiance. Une vrai pile d’énergie qui ne tient pas en place et qui fait le show à elle seule, nous faisant presque oublier les musiciens qui sont beaucoup trop discrets à côté de ce qu’elle dégage. Le public est en ébullition lorsqu’elle décide de se mêler dans la foule, continuant de chanter l’air de rien au milieu d’un attroupement respectueux qui ne l’empêchera à aucun moment de faire sa musique, et qui se poussera même pour la laisser remonter sur scène à la fin du morceau. Très classe.
Une belle revanche pour le groupe, qui à bataillé à ses débuts dans les années 90 lorsque personne ne voyait une femme noire à la tête d’un groupe de rock militant. Trop grande gueule et revendicatif pour les américains, et trop hétéroclite pour se ranger dans les standards brit pop de l’époque.
Skin prendra la guitare sur Weak, accompagnant le reste du groupe à l’acoustique. Changement radical d’ambiance. Il est l’un des morceaux les plus emblématiques du groupe. La voix singulière se fera déchirante émotionnellement pour notre plus grand bonheur. Notons la présence d’Erika Footman membre encore non-officielle qui n’est autre que la femme de Mark avec laquelle Skin fera plusieurs duo au cours de la soirée.
Le tout saupoudré d’un jeu de lumière magnifique qui rend honneur au groupe et apporte tout le dynamisme qu’il faut pour accompagner ce cocktail vitaminé sur scène. Skunk Anansie fait partie de ses groupes qui ont un petit quelque chose en live, qui les rendent encore meilleurs qu’en studio. Ils font définitivement partie des groupes pour qui ils vaillent la peine qu’on se déplace. Un grand merci a eux pour ce moment.
The Sisters of Mercy :
Groupe ressurgit des tréfonds de l’underground britannique. The Sisters of Mercy se forme en 1980 et connaît deux séparations temporaires jusqu’en 1995. Depuis ils sont toujours en activité, mais relativement discret. Ils font une réapparition marquée, en jouant au Hellfest sur l’édition 2019. En outre, ils n’ont enregistré aucun nouvel album depuis, le dernier étant officiellement sorti en 1993. Il existe bien une version pirate d’un album inédit nommé Go Figure, mais celui-ci n’est jamais paru. Leur chanteur n’est d’ailleurs contractuellement plus lié à aucune maison de disques pour l’heure. Ils ont la particularité d’avoir abandonné la batterie à leurs débuts et de n’avoir jamais fait appel à un batteur que ce soit en live ou en studio, ce qui fera très rapidement partie de leur identité musicale.
Le line-up a considérablement changé depuis ses débuts, actuellement le groupe est toujours composé de Andrew Eldritch au chant, Doktor Avalanche à la boîte à rythme, Christ Catalyst et Ben Christo aux guitares et au chant. Ils ont sorti 5 albums et chantent en anglais.
Alors qu’ils n’avaient pas joué depuis au moins huit ans, le choix de la River Stage semblait être plutôt approprié pour ce groupe quasi quadragénaire. Que nenni. Le chapiteau s’est rempli à une telle vitesse, qu’il en débordait de tous les côtés. Autant dire que pour se faire une place de choix devant la scène il aurait fallu écourter le concert des Skunk Anansie.
À peine le concert commencé qu’on retrouve ce son typique des années 80. Il faut dire que l’utilisation de la boîte à rythmes un poil trop forte y est pour beaucoup. Car rappelons, le groupe n’a pas de batteur et n’ en n’a jamais voulu. Les guitaristes sont de sacrés transmetteurs d’énergie, bougeant de part et d’autres à coup de riffs maîtrisés et d’une assurance absolument naturelle. Les guitares se complètent dans leur rôle. La basse manque cruellement sur certains morceaux. La section rythmique se retrouve grandement limitée sans batteur ni bassiste, même si Doktor Avalanche prend le relais sur certains morceaux.
Très influents à l’époque, ils ont fini par être malgré-eux associé au mouvement gothique, chose qu’ils ont toujours strictement démentie. Ils semblent aujourd’hui séduire un plus large public et font désormais partie du panthéon des groupes rétro qui font danser les anciennes générations.
La voix vieillissante mais toujours reconnaissable, Eldritch garde un charisme mystérieux en dépit du fait qu’il n’a évidemment plus la plastique de sa jeunesse. À part les lunettes. L’âge étant, le groupe a grandement gagné en sobriété et force est de constater qu’ils ne jouent plus sur leur identité visuelle et qu’ils ont perdu en prestation scénique. Est-ce bien grave ? Non. A vrai dire c’est un choix plutôt judicieux. Ils ont su gagner en simplicité, ce qui leur évite de tomber dans la caricature maladroite.
Le show est carré sans chichi ni fioriture, et tout est joué avec une précision de maître. Le public aura droit à quelques classiques tel que Temple of love ou This is corrosion. L’ambiance est particulièrement chaude et il est difficile de garder sa place avec l’agitation du public autour. The Sisters of Mercy aurait sans problème pu jouer sur la scène principale au vu de la foule qui se presse autour. La River Stage se révèle être trop petite pour le mastodonte anglais. On ne peut pas faire le reproche au groupe de fonctionner, mais on ne peux pas vraiment reprocher au festival d’avoir fait le mauvais choix, étant donné qu’ils sont plus particulièrement actifs en dehors des quelques concerts effectués il y’ a quelques années.
Dans la famille des bémols à citer, je voudrais, la lumière. La nuit est tombée, le groupe a hérité du chapiteau, et voilà que nous avons droit à un combo lumières bleue + brouillard pratiquement tout du long. Il est déjà compliqué de se frayer un chemin dans la foule qui déborde de tous les côtés, la scène est en plus de cela difficile à regarder de loin. Choix délibéré ou overdose d’effets scéniques ? Difficile à dire.
Outre cet aspect que devient The Sisters of Mercy ? Ils restent un bon vieux groupe de rock à l’ancienne, qui certes a perdu en prestance scénique, mais qui continue d’assurer le boulot malgré un manque de basse. La belle part ne peut qu’être faite sur les morceaux culte puisque le groupe n’a sorti aucun album depuis près de 25 ans. Ceux et celles qui ont pu connaître à l’époque seront ravi de pouvoir se payer une bonne tranche de nostalgie C’est incontestablement le groupe rétro de la soirée, tant par la sonorité que par le vécu. Ils réentament une tournée mondiale cette année et nous ne pouvons que leur souhaiter bonne chance.
Prophets of Rage :
Prophets of Rage se forme en 2016 en réponse à l’élection de Donald Trump à la présidentielle américaine. Composé d’anciens poids lourds de la scène musicale (Cypress Hill, Rage Against the Machine et Public Enemy) et orienté vers le rapmetal. Il est considéré comme un supergroupe bien que ce terme soit réfuté par Tom Morello (Ex-guitariste de Rage Against the Machine) qui considère plutôt la formation comme un groupe de musiciens révolutionnaires combattant le fascisme politique. Profondément engagés en faveur des minorités, leur première tournée se prénommera Make America Rage Again ( Enragez de nouveau l’Amérique) détournant ainsi le slogan de Donald Trump, Make America Great Again (Rendre sa grandeur à l’Amérique) . Ils n’ont sorti qu’un seul album pour le moment parut en 2017, mais celui-ci comporte des reprises de chacun des groupes respectifs d’origine. À noter que Zack de la Rocha chanteur des Rage Against the Machine a décliné l’invitation de se joindre à eux. Le line-up est composé de Tom Morello à la guitare, Tim Commerford à la basse, Brad Wilk à la batterie (Tous issus de la formation initiale de Rage Against the Machine) , B-Real (Cypress Hill) et Chuck D (Public Enemy) au chant, et DJ Lord (Public Enemy) aux platines.
Dernier groupe de la soirée à jouer sur la scène principale, les barrières sont déjà bondées de monde avant même le début du concert. Il faut dire que le planning ne laisse pas de temps mort, et comme dans la majorité des festivals, cela demande un peu d’organisation pour se faire une place de choix.
Mais voilà qu’un son de sirène annonce enfin l’arrivée tant attendue de nos messies enragés. Et enfin le grand final commence.
Tom Morello lui est toujours aussi en forme et ne se ménage pas dans un jeu de guitare qui n’est plus à prouver, soutenu par la basse lourde et puissante de Tim Commerford et un Brad Wilk qui n’a rien perdu de sa puissance. Et il faut dire ce qui est, avec tous les anciens zikos de Rage Against the Machine, on reconnaît parfaitement ce son singulier typique du groupe. Inévitablement, nous savons que la plupart des gens qui sont ici viennent pour les tubes de RATM. Et si l’on peut toujours craindre l’idée d’une déception quant à la comparaison au chant avec Zack de la Rocha, Chuck D et B-Real se révèlent être des successeurs qui tiennent parfaitement la route.
Prophets of Rage à aussi cette particularité de contribuer à réconcilier deux univers musicaux souvent dissociés, et parfois même représenté comme étant incompatible, voir ennemis. Rappeurs vs metalleux. Un mélange qui n’est plus révolutionnaire, mais qui est encore loin de représenter une majorité sur les deux scènes respectives.
Il est intéressant de noter que que les anciens de Cypress Hill et Public Enemy faisaient également partie des pionniers du rap et du hip/hop dans les années 80. Ainsi on retrouve aux platines et au chant l’esprit revendicatif et controversé de cette époque, avec un petit quelque chose de nostalgique et ce son unique typique de l’époque 80/90 qui n’existe pratiquement plus aujourd’hui et qu’on retrouve avec plaisir dans ce cocktail metal détonant.
Mais Prophets of Rage compose aussi avec succès. Unfucked the world joué sur en scène en sera la preuve, avec une déferlante de pogos et un public très agité. Toujours les poings levés en l’air sans jamais rien lâcher, le groupe ne laisse aucun répit à la haine, alignant les messages politiques avec un Tom Morello qui brandit sa fameuse guitare Arm the homeless, épinglée par une croix gammée barrée. Le message est très clair. Une partie des musiques seront toutefois des reprises de chacun des groupes respectifs, comme How i could just kill a man pour Cypress Hill, et Fight the power de Public Enemy, mais c’est incontestablement celles de Rage Against the Machine qui ont le plus de succès. Know you ennemy, Bullet in your head, Testify et le fameux Killing in the name morceau le plus attendu par le public.
Prophets of Rage est un groupe composé de membres qui n’ont plus rien à prouver sur leur qualité de musicien. Après plusieurs années et divers projets entre-temps, aucun d’entre eux n’ont perdu leur esprit d’insoumission et ce projet semble finalement être la continuité d’une suite logique. Ou comment faire du neuf avec du vieux, mais surtout le faire bien. Alors bien évidemment, il faut se sentir concerné par le côté ultra politisé de la chose, mais pour celles et ceux qui auraient perdu foi en l’humanité, se retrouver au milieu d’une foule adhérent à ses messages de résistance et de voir cette pluralité musicale sur scène, donne énormément de baume au cœur.
Maintenant une petite question nous taraude. Si le groupe s’est formé suite en réponse à l’élection de Donald Trump, verrons-nous toujours le groupe sur scène le jour où celui-ci aura terminé son mandat ? Ou aurons nous droit à l’effet tour Eiffel ? Seul le temps nous le dira. Pour le moment, nous ne pouvons que vous conseiller de voir cette bombe musicale sur scène si vous en avez l’occasion.
Bilan :
Un quasi-sans-faute pour ce festival d’exception. Ajoutons à cela des bénévoles aux petits oignons, une très bonne organisation, et un site fluide vraiment bien foutu. Le Venoge Festival fait partie de ces lieux conviviaux qu’on ne fera peut-être pas les 5 jours selon nos propres goûts, mais qui apporte une diversité musicale afin de convenir au mieux aux attentes de tout un chacun. Rien que pour l’ambiance il mérite que l’on s’y attarde en se donnant la peine d’y aller. Nous savons que l’année prochaine, le festival déménagera pour aller sur un autre site. Nous espérons que tout cœur que cela lui permettra d’évoluer et de grandir car c’est un succès mérité. Aux organisateurs et organisatrices du festival, aux bénévoles sans qui tout cela serait impossible, aux gardiens de la fête, aux secouristes et tous ceux et celles que nous n’avons pas citées et qui travaillent dans l’ombre pour préserver la culture musicale. Un grand merci à vous.
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