La soirée des grandes gueules.

La soirée des grandes gueules.

24 février 2020 0 Par Jack

Live report, Jinjer, The Agonist, Khroma, Space of variations, BlackBeard Music

7 Décembre 2019. La ville frontalière d’Annemasse nous accueille pour une soirée hurlante à Château Rouge. Retour sur cette soirée qui a envoyé du pâté.

BlackBeard Music :

BlackBeard Music est un groupe annemassien électro-rock aux teintes stoner. Il est composé de Antoine Marmoux à la batterie, Ziggy Bochard à la basse, Jérémie Vailloud et Julien Doucin aux guitares et aux chants. Ils chantent en anglais, et ont sorti 1 CD, ainsi qu'un vinyle pour le moment. 

C’est donc BlackBeard qui a la lourde tâche de démarrer les festivités de cette soirée qui affiche sold-out. Pas facile pour des locaux d’être les premiers à démarrer face aux têtes d’affiches, et l’exigence du public. Le concert démarre d’une manière assez soft, peut-être un peu trop de prime abord sur le premier morceau, même si l’on peut y voir une intention tout à fait volontaire servant à mettre une ambiance progressive. Mais, de morceaux en morceaux on se rend compte que le groupe monte d’un cran, et il faut reconnaître que le public s’attroupe avec plaisir autour de la scène.

BlackBeard – ©Marc Antoine Panda

Et comme tout groupe de stoner qui se respecte, la basse possède une jolie prédominance qui la démarque des autres instruments. Les doutes se dissipent, et clairement, ils ont la niaque. Chaque membre s’investit comme il peut avec la place qu’ils ont. Il faut dire que la petite scène dans la salle du bar, limite un peu l’espace pour les artistes.

Moins d’une heure plus tard, c’est déjà terminé, et il faut changer de salle. On repart sur un sentiment positif et plutôt satisfait de cette mise en bouche. Le groupe a su instaurer une bonne ambiance en prévision du reste, nous ne pouvons que les encourager à persévérer, à se perfectionner et à ne rien lâcher.

https://www.facebook.com/BlackBeardMusic/

Space of Variations :

Space of Variations est un groupe ukrainien de metal, hardcore et electronicore. Ils n'hésitent pas à expérimenter divers styles musicaux afin de se forger un univers unique. Le groupe est composé de 
Dima Kozhuhar au chant, Alex Zatserkovny à la guitare et également au
chant, Anton Katsatkin à la basse et Tima Katsatkin à la batterie. 

Venus de loin, ils sont encore peu connus dans nos contrées … à tort. Space of Variations possède une aura particulière, en partie dû à son ambiance électronique prédominante qui constitue indéniablement leur marque de fabrique. Oscillant entre deathcore psychédélique et cri de rage hardcore, ce petit groupe s’impose tel un mastodonte du genre. Les basses sont imposantes, et grignotent légèrement sur la mélodie, mais l’euphorie du public est palpable. Cette fois-ci, c’est Alex Zatserkovny le guitariste qui aurait tendance à attirer l’oeil. Il dégage une aura presque dérangeante, très 60’s avec sa tenue. Mais, quid du style, ce n’est pas un amateur. Comme tous les autres musiciens qui le prouvent à coup de riffs, et de blasts beats maîtrisés et bien sauvage. L’électronique se mari parfaitement au reste.

Space of Variation – ©Marc Antoine Panda

Ovni dans le milieu metal, cette veine hétéroclite n’est pas sans rappeler d’autres groupes qui ont su se faire un nom en associant 2 genres aux antipodes l’un de l’autre. L’électro peine encore à s’affirmer parmi les puristes du milieu, mais la nouvelle génération semble prête à vouloir lui faire une place. À l’instar du rap qui a su s’imposer avec des groupes tels Limp Bizkit, Hollywood Undead ou encore les français de Rise of the Northstar.

Une des meilleures surprises de la soirée. Si ce n’est la meilleure. Probablement le plus innovant de tous, et le plus surprenant sur le papier. Un pari risqué, qui se révèle plus astucieux qu’on ne l’imaginait de prime abord. Nous ne pouvons que leur souhaiter de continuer leur tournée afin de se faire connaître davantage. Affaire à suivre.

https://www.facebook.com/SpaceOfVariations/

Khroma :

Khroma est un groupe finlandais de metal électronique . Le groupe se compose de Antti Honka à la batterie, Maarik Leppä à la basse, Mikko Merilinna à la guitare et au clavier,  et Riku Rinta-Seppälä au chant. Ils ont sorti 2 albums et chantent en anglais. 

La soirée enchaîne tout doucement, et c’est au tour de Khroma de prendre place sur la scène. Il semblerait que Space of Variations ne soient pas les seuls à utiliser l’électro ce soir. Pourtant les deux groupes ne sont pas véritablement comparables dans la manière de l’intégrer dans leurs morceaux. Ici, on tend davantage sur une sauce trip hop tout en légèreté, qui ne dénature pas l’esprit metal du groupe.

Les artistes tiennent bien la scène, ils bougent, mettent l’ambiance dans la salle. Le batteur est efficace. Le spectacle est divertissant. Si l’univers en lui-même ne fait pas un effet bœuf, force est de constater qu’ils se défendent bien. Il y’a un travail évident en amont de leur part. Les refrains sont dynamiques et nerveux, mais, certains couplets redondants manquent d’un peu de panache au niveau de la voix. Pourtant, Khroma a tout sur le papier pour réussir. D’aucuns diront qu’il s’agit d’une histoire de goût, c’est probablement le cas. Toutefois la performance reste à saluer. Ils ont du potentiel, et en ont dans les tripes. La guitare et la basse se mêlent de manière cohérente à l’ensemble. Pas d’amateurisme ici non plus. Tout est très professionnel. Mais, on a malgré tout cette sensation de se retrouver devant un plat qui manquerait d’un peu de tout.

Khroma – ©Marc Antoine Panda

Il faut leur reconnaître néanmoins une présence scénique fort agréable et entrainante, et tout comme Space of Variations, une certaine ambition dans ce mélange des styles musicaux. Leur gros point fort reste ce sentiment d’expérimentation qui ne donne pas l’impression de tomber dans le réchauffé. Et c’est important de le souligner malgré les quelques critiques précédentes, parce qu’il n’est jamais facile de tenter l’innovation dans un milieu encore très puriste, bien que les mélanges ne datent pas d’aujourd’hui, et qu’ils s’imposent de plus en plus sur les gros festivals.

Si on reste sur notre faim, la foule semble satisfaite. Qu’a cela ne tienne, nous les félicitons malgré tout pour le concert, et leur souhaitons de faire encore mieux avec le temps. Ils ont du potentiel et sont très investis avec leur public. Les amateurs de metal électro pourront y trouver leur compte sans problème. Il y’ a encore matière à creuser dans ce domaine. L’évolution de Khroma est à suivre avec intérêt.

https://www.facebook.com/khromaband/

The Agonist :

The Agonist est un groupe canadien de metal extrême, avec d'importantes influences de death metal. Lors de leur formation en 2004, ils officiaient sous le nom de The Tempest qui sera remplacé en 2007 par l'actuel. En 2014, ils se séparent d'Alissa White-Gluz devenue chanteuse de Arch Enemy.
La formation est composée Pascal Jobin et Danny Marino aux guitares,
Simon McKay à la batterie, Chris Kells à la basse, et de Vicky
Psarakis au chant.  Ils ont sorti 5 albums et chantent en anglais.
The Agonist prend la pose pour Warm TV – © Marc-Antoine Panda

La voix est l’un des marqueurs les plus importants d’un groupe. Celui que le public va retenir en premier, bien avant le visage des ses musiciens. Après 10 ans passés avec Alissa White-Gluz, le pari était risqué. Passer comme deuxième chanteuse d’un groupe est un véritable challenge, tant l’aura de la précédente peut planer. Quel est le verdict après six années passées ?

Entre chant clair teinté de douceur, et un growl puissant, The Agonist s’inscrit dans la lignée de ses groupes de musique extrême sans toutefois révolutionner le milieu. Cependant, il faut leur reconnaître un engagement militant au travers de certaines chansons, qui sont un parti pris en faveur de certaines causes. ( Trophy Kill qui dénonce la surconsommation et la cause animale en est un très bon exemple. ). Bien évidemment cet aspect restera à l’appréciation de chaque personne, car tout le monde ne va pas forcément voir un concert pour cela. Pour beaucoup, c’est avant tout l’occasion de passer un bon moment, et de se défouler entre deux bières-pipi.

The Agonist – ©Marc Antoine Panda

La sauce mettra un peu de temps avant de prendre. Il faut dire que quelques problèmes de sons s’en font ressentir du côté des guitares. Quelques soucis de timing à déplorer qui ne sont pas vraiment digne de ce qu’ils sont capables de faire. Mais, le groupe reste à fond dans son délire, pour le plus grand bonheur des fans. L’attention restera davantage portée sur le chant qui reste véritablement le point le plus intéressant. En revanche, le batteur fournit une prestation aux petits oignons. Malgré ses quelques problèmes, le groupe tient la cadence avec brio, et la chanteuse fera même l’effort de s’adresser au public avec quelques mots de français, entre deux morceaux.

Une chose est certaine, The Agonist a prouvé que vivre dans le passé n’était pas des plus bénéfiques. Vicky Psarakis remplace avec brio la précédente lead vocal du groupe. La performance de ce soir aurait pu être meilleure, mais reste largement acceptable. Le groupe a su faire plaisir à son public, et c’est le plus important.

NDLR : Le groupe qui était présent au merchandising après la soirée a même accepté une petite photo pour le média, nous les remercions grandement pour leur gentillesse et leur accessibilité.

Jinjer :

Jinjer est un groupe ukrainien de metalcore formé en 2009. Le groupe
n'hésite pas à jongler entre différents styles, incorporant plusieurs éléments de djent, ou de hardcore dans leur musique. Ils se font connaître en remportant plusieurs prix dans des concours de metal dans leur pays. Ils ont sorti quatre albums pour le moment. Le groupe est composé de Tatiana Shmailyuk au chant, Eugene Abdukhanov à la basse, Roman Ibramkhalilov à la guitare et Vladislav Ulasevich à la batterie. Ils chantent en anglais.

La salle est plongée dans le noir … le compte à rebours commence. Le concert peut enfin commencer. Jinjer en met plein la gueule. Littéralement. Un torrent de puissance musicale se déverse dans la salle, emmenée par la très charismatique Tatiana Shmailyuk. Le public est en ébullition, prêt à botter des culs par-ci par-là.

La malédiction des problèmes de sons frappe une nouvelle fois, mais cette fois-ci du côté la voix. Seulement, les mêmes reproches étaient à déplorer lors de notre passage au Plane’R’Fest. Il est important de le souligner afin de ne pas systématiquement incriminer les salles ou les festivals. Or le problème semble être ailleurs. Pourquoi un groupe de cet envergure ne corrige-t-il pas cela ?

Ceci étant dit, l’ambiance couplée aux écrans derrière la scène font un effet particulièrement réussit. Comme toujours, la prestation se révèle être de haut niveau tant du côté de la guitare, que de la basse. Le batteur guerrier dans l’âme, s’accorde magnifiquement avec l’ensemble. La voix reste le moteur central de cette formation aux mécaniques bien huilée. Entre chant clair et guttural ténébreux, l’harmonie reste bien maîtrisée.

Jinjer – ©Marc Antoine Panda

Jinjer nous fera même l’honneur de chanter dans sa langue natale avec le morceau Retrospection. C’est un vrai bonheur de sortir des sentiers battus de l’anglais pour se risquer à quelque chose de moins connu, surtout dans ses contrées ou l’ukrainien n’est pas monnaie courante. Mais leur notoriété leur permet largement cette prise de risque. Et ça fonctionne. C’est intéressant, très beau, et cela apporte une autre dimension. Le meilleur moment de leur performance sans aucun doute.

Le public toujours aussi fou ne se ménage pas. Plusieurs hématomes et courbatures plus tard, le groupe clôture le concert par Pisces, morceau le plus emblématique du groupe, qui soulignons le, à atteint presque 30 millions de vues sur Youtube à l’heure ou cet article est écrit. Une performance remarquable pour une formation metal avec un lead vocal féminin.

Ambiance – ©Marc Antoine Panda

Malgré des problèmes de sons à déplorer, Jinjer a fourni une excellente performance. Avec quelques améliorations du côté du son, le concert aurait pu être un sans-faute à tout les niveaux. Cependant, comme pour tous les autres groupes, nous les encourageons vivement pour la suite, et leur souhaitons bonne chance.

Sur ses belles paroles, la soirée se termine, et il est temps pour tout le monde de rentrer … ou de continuer à boire des bières au bar.

Bilan : Une soirée hétérogène dans les styles, et avec le metal pour noyau central. L’aspect metal électronique clairement mit en avant était un pari à prendre, et il s’en retrouve plutôt réussit dans l’ensemble. Si ses deux milieux sont encore souvent opposés, il ne fait aucun doute que le mariage est réussit.